dimanche 31 mai 2015

MARION ROBERT : L’ÉMANCIPÉE (Lucien Ruimy)


Les couleurs douces s’accumulent sur sa toile, petit à petit de transparence en transparence Marion Robert conquière sa toile. Elle créer un espace où elle nous appelle à la suivre.
C’est dans cet univers abstrait, ce creuset pictural, que petit à petit Marion fait naître des personnages à peine suggérés, qui émergent en douceur de son univers chromatique tels des apparitions qui sortent de la matière picturale. Les personnages sont créés par la peinture qui leur donne vie.
Mais il n’y a là rien de mièvre le geste est ferme, le trait est enlevé ;  Marion sait où elle va et où elle veut nous amener.
Sa peinture est à la frontière entre figuration et abstraction. Elle y affirme un univers qui est des plus personnel.

Concentrée sur sa peinture, elle nous fait entrer dans son univers de rêve doux, dans une tendresse pour la vie et les autres qui est rafraîchissante et qui nous transporte.


CLAIRE ESPANEL : PRESENCES AMES EN SUSPENS... (Yannick Lefeuvre)


S'il en est d'une âme, son imprévisible rencontre fut peu imaginée. Sur la transparence d'un calque, elle trace la présence possible de l'entité. Ni animale, ni humaine une chair en suspension nous signale son existence. Elles sont là. Ils sont là enfin visibles. Dans ce paysage d'ombres, de silhouettes de troncs posés sur un sol liquide, des êtres hybrides recroquevillés sur eux mêmes se tiennent comme en lévitation.
Claire Espanel s'en tient au noir et blanc, blanc d'autant plus profond que le noir puissant le fouaille au corps. L'artiste ouvre notre esprit à l'incomplétude, à quelque chose en train de se faire, de se mouvoir et de tenter d'exister... Ce temps suspendu que l'artiste nous donne à ressentir est rare.
Temps de silence, malaise à traverser, bruissements chuintés qui donneront poids à ces entités esseulées qu'elle nous révèle. Parcelles de mouches, morceaux de bestioles saisis en plein vol, fluidifications et révélations de visages en extensions vibratiles. Elle crée des limites qui s'effacent d'elles mêmes sur des fonds aux abysses confus. Une fois happé par un point de fuite que sa toile organise, nous voilà dépositaires de l'invisible. 
Alors, nous reviendrons vers ses toiles énigmatiques avec au bord de nos lèvres une question essentielle... celle du poids possible de notre âme en devenir.

samedi 30 mai 2015

COCO TEXÈDRE : J'AVOUE, JE NE L'AI PAS VUE... (Yannick Lefeuvre)


Trop coloré, trop culotté, trop féminin… son travail... j'avoue, je ne l'ai pas vu. Je suis passé à coté.
Parfois à ne pas voir, on touche du doigt son insuffisance et de fait plus tard la présence en creux de l’artiste nous saute aux yeux… mais dans l'après-coup... est-ce trop tard ?
Je viens ici reprendre et apprendre d'elle ... de son parcours, de ses fulgurances et de son cri... le féminin singulier, c'est elle !
Que nous donne-t-elle à regarder que je n'ai pas su voir ?
Des couleurs, des textures avec des failles, des échancrés, des bordures ... une émotion tactile affleure ... des couleurs pulpeuses, tranchées et radicales... des paysages, des frontières, des matières à foison ... et une envie de toucher, d'y glisser un doigt ... j'ai pas osé... fallait-il ?
« Que la terre produise de la verdure, de l'herbe portant de la semence.. » raconte la genèse. En écho, Coco Téxèdre prend autant racine dans l'origine mythique que dans sa fêlure intime, elle dévoile hors tabou. Si elle traque le tragique pour un dire qui fera langage un jour vers un vivre autrement, il lui fallait au préalable affirmer les réels de sa féminité.
C'est peut être ça en tant qu'homme que je n'ai pas osé affronter.  

mercredi 27 mai 2015

ANNE ZABLOT : L'ÉLAN VERS LE SENSIBLE (Lucien Ruimy)

Toujours sur la corde raide, chaque coup de pinceau pouvant détruire l'équilibre de ceux qui l'ont précédé. Il faut savoir s'abandonner, accepter la pulsion du geste afin de rester libre.
Anne Zablot vit sa peinture "comme un rapport amoureux" où elle s'abandonne à la grâce de l'instant.
Mais si les gestes sont forts, les couleurs, elles, gardent une grande sensualité. Sa peinture exprime, ainsi, son moi intérieur, sa personnalité douce et inquiète. Toutes les étapes de la construction des oeuvres sont visibles, montrant à la fois la maîtrise et la sensibilité du geste.
Même si Anne nous dit être à la "recherche de l'improbable", elle est in fine celle Qui décide de son univers.
Sa peinture est vraie, directe sans compromis, sa gestuelle est dynamique elle ne s'arrête qu'avec les limites de la toile. Du chaos elle tente de faire surgir une organisation nouvelle, un équilibre des couleurs, un ensemble cohérent. Elle transcrit sur la toile sa musique intérieure.

samedi 23 mai 2015

SYLVIE LOBATO (Jean-Henri Maisonneuve)

Ici, les corps prennent forme. Où les formes prennent corps. Le travail de Sylvie Lobato met en lumière la genèse de l’être. La terre originelle se meut, émeut dans son spasme de résistance au chaos initial, dans des élans d’ocres, de rouges, de bruns, de clairs et d’obscurs.
Humus, glaise, chair, le souffle sacré vient tout organiser dans une frénésie sensuelle et fait tournoyer des corps diffus, qui tendent quelquefois à l’abstraction d’un lyrisme vertigineux ; des êtres aux contours inachevés, indistincts, mais cependant tangibles, pour exprimer l’intangible loi de la vie en éclosion. Le Golem surgit d’un souvenir de la Genèse, ou du Popol Vuh. L’artiste est prométhéen et célèbre le règne du terraqué. La dimension mythologique traverse les toiles de Sylvie Lobato depuis toujours.
Si la vie est possible, c’est aussi dans la rencontre charnelle avec l’autre, cet autre qui semble parfois engendré par le mouvement même de la chair en convulsion. L’acte créateur retrouve le mythique androgyne.
Pour l’intensité, c’est Goya qui rencontrerait Velickovic. Un combat épique se joue dans ces œuvres : l’artiste en corps à corps avec son sujet, l’être qui lutte pour tenter sa chance d’exister, le spectateur, pris d’assaut par tant de passions divisées.
En fin de compte, l’enjeu est crucial : c’est toute la condition humaine qui est donnée à voir dans ce travail fascinant.