mercredi 10 avril 2019

Marion TIVITAL : HUM ! (Annie et Yannick Lefeuvre)



(photo Fanny Begoin)

Marion TIVITAL

Sous le regard des toiles, une succession d'émotions nous traverse, c'est le propos d'un festival d'art que de nous enivrer de sensations diverses. Certaines nous arrêtent, d'autres nous exaltent et d'autres encore nous indiffèrent. Devant ces dernières, nous passons sans voir autre chose que notre incompréhension voire notre ennui et c'est dommage car je fais le pari que ces émotions là, négligées portent peut être en elles plus de richesses que celles qui nous conviennent d'évidence Entre celles du coup de cœur qui reste écho d'un déjà là et celle du verbe muet qui demande à décrypter le bruit du silence, il y a le risque de l'écoute du parti pris de l'artiste. Entre le balisé qui répète et le tout autre ailleurs qui ouvre un champ d'incertitudes, notre choix se tient là. 

Dans les toiles de Marion Tivital, il y a ce réel là où froncent les sourcils et comme aucun détail ne nous explique quoi que ce soit sinon l'évidence de lieux, de paysages et d'objets connus, nous sommes initiés à inventer de nouveaux liens. On passe devant, on passe à coté, on trépasse, on s'absente près d'une maison suspendue, d'une silhouette d'usine au bord de mer, d'un toboggan vide pour piscine orpheline, de bouteilles de plastiques sans étiquettes. En échos éveillés, on peut y ressentir du masculin et du féminin, de l'éros et du platonique, du vide et du plein qui toutefois baignent dans une brumeuse atmosphère. Et s'il n'y a pas d'humains sur les toiles, l'humain lui, est dans le voile, dans le regard de l'artiste qui par cette brume douce qui enveloppe les objets et les lieux humanise le vide. Alors, ainsi élagués à ce point de non références, nous nous inventons des seuils à franchir qui nous mènent par exemple de « hum ! » au verbe «  humer ». Humer donc une tragique humidité, ce qui en peinture est un privilège rare.