samedi 20 juin 2015

PHILIPPE CROQ : SUR FOND DE COULEURS, VISAGES, CORPS, LIGNES ET SIGNES PAPOTENT... (Yannick Lefeuvre)


Parfois au matin, on cherche les éléments d'un rêve pour le reconstituer. Ça nous revient par bribes, fragments, traces, griffures... C'est à la fois exactement ça et autre chose... ça s'invente dans une narration sans cesse interrompue... ça se dilue trop vite... les images se diffractent... un mot surgit mais le poids du discontinu déchire son sens...
Philippe Croq nous entame avec ses propositions picturales là. Y a-t-il un cherche à dire dans la composition de ces éclatements là ?
Tout semble posé mais rien n'est formulé. Un soi apparaît là où le double disparaît. Souvent ombres, traces et reflets se dessinent dans une confusion d'intérêts contradictoires. Alors, ainsi invitée la sensation visuelle de parcelles de vérités vécues nous foudroie.
Mais ne nous trompons pas, ses toiles sont très construites dans leur déconstruction. Parfois une verticale tend vers un équilibre juste pour chuchoter un couleur. Il sait asseoir une horizontale, au bord du tremblé, de la ligne de partage entre un mot, un son, une vibration, une odeur, un frisson, une haine fracassée. Par petits signes, bribes, lignes et teintes, il articule son univers. De ce fait, on se surprend à rêver encore et encore ... renouant ainsi avec notre rêve nocturne du début tout à coup actualisé.
Une telle approche demande une écoute qui avance sur un fil fragile voire distendu sur le seuil de rupture. Sommes-nous quelque part dans ce qu'il nous donne à voir ? Ses tentatives émouvantes d'évitement de sens, de tissage de fils d'araignée, de grilles estompées, de rebords calqués le propulsent avec jubilation dans une possible résurrection. Ses apparitions de corps esquissés, fantomatiques, de visages étranges semblent glisser sans autres poids que leurs désespérances. Pourtant dans ce vide apparent dialoguent (malgré lui ?) des teintes fugaces, des mélodies interrompues, des accords discordants...
Nous savons en écho au fond de nous mêmes que ça a eu lieu pour nous aussi. Ceci reconnu, l'artiste nous invite à franchir ensemble le seuil d'un monde perdu ... à le dénuder encore avant d'hypothétiques reconstructions.

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