Il ré-invente le monde, le ré-écrit, le ré-enchante, tel un
coloriste génial dont l’unique objet serait de repeindre ce qui l’entoure en
couleurs de feu, histoire d’y ajouter un peu de poésie.
Michel Séméniako s’approprie les paysages, les transforme,
les sublime, y inscrit une part trouble de mystère, un je-ne-sais-quoi de
magique et de surnaturel. C’est un photographe atypique, dont les images ont
ceci de particulier qu’on ne les oublie pas…
Lui qui a longtemps sculpté le monde par le noir et blanc,
s’inscrit désormais dans un processus colorisé éminemment poétique.
« Pratiquant des temps d’exposition très longs, il se déplace, sans jamais
apparaître, dans l’espace photographié qu’il éclaire à la torche électrique. En
redessinant des contours fictifs, en multipliant les directions d’ombre et de
lumière, il sculpte des volumes qui transposent les objets et les paysages dans
un univers onirique où les frontières entre visible et invisible, réel et
imaginaire s’entremêlent » est-il précisé sur son site, et ses images
apparaissent en effet comme de pures inventions inspirées du réel, presque des
vues de l’esprit. Il y a dans ce travail la volonté d’apposer sur le cadre
naturel – une usine, un arbre, une plage – le filtre inventif, coloré,
jubilatoire d’un regard aiguisé par des années d’expérience.
Loin de tomber dans le piège du décoratif, Michel Séméniako
utilise la couleur pour re-définir le paysage choisi. A l’image du peintre orientant,
selon l’inspiration, la lumière qui éclaire son modèle et modifie de fait les tonalités,
les ombres et les clartés qui le précisent. Le résultat est toujours
surprenant. Les arbres prennent des teintes inédites qui s’opposent et se répondent, insolites mises en scène de
sous-bois nocturnes qui semblent régurgiter les couleurs du jour qui vient de
s’éteindre. Même les lieux a priori moins « photogéniques », telles ces
usines désertées par l’homme, le temps de la pause sommeil, paraissent
transfigurées, soudain animées d’une âme que l’on ne soupçonnait pas. C’est
bien l’essence même de l’art de Michel Séméniako : révéler par la couleur
la vie intérieure de toute chose, de tout objet, de tout paysage, le
chuchotement du monde.
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