mardi 19 juin 2018

ANNE LESCA : LA DÉLICATESSE DE LA MATIÈRE (Lucien Ruimy)


Même si la céramique domine les travaux d'Anne Lesca, ceux-ci sont marqués par l'utilisation d'une variété de matériaux : bois, bois brûlés, métal... Mais ce qui domine c'est l'élégance, la finesse et la délicatesse malgré la dureté des matériaux.
Jamais chargés en couleurs, elle nous offre des œuvres épurées aux lignes sobres.
Le métal utilisé en fil a des apparences duveteuses et la céramique a une finesse telle que l'on a l'impression que c'est du papier. Le bois brûlé, associé à des structures métalliques nous ramène à l'élément fondamental de la vie : le carbone.
Ses travaux sont toujours construits, ils laissent peu de place au hasard.
Il y a là la volonté de nous entraîner dans son monde.






CHLOE COTTALORDA (Michel Foucault)


En  revisitant d'une manière contemporaine la technique ancestrale de la grisaille utilisée pour les vitraux, Chloé Cottalorda  développe un univers personnel en noir et blanc qui joue avec la lumière et la transparence du verre. Sur une plaque de verre préalablement recouverte d'une poudre grisâtre (à base d'oxyde métallique), elle fait émerger ses images entre le noir qui occulte et le transparent qui révèle le blanc d'une couche inférieure. Ces images subtiles tout en nuances de gris nous racontent d'étranges histoires : des corps désirables et fragiles côtoient de  troublants personnages hybrides mi-homme mi-animal.
Avec une jubilation non dissimulée, Chloé Cottalorda se plaît à mettre en scène des saynètes où tout est placé sous le signe du jeu et de la facétie. Rien n'est à prendre au sérieux, tout est à regarder en souriant. L'artiste traque et questionne avec humour ce qui est profondément enfoui en chacun de nous : l'intimité des corps, nos rapports avec les autres, nos peurs et nos désirs.
« Gommer les désirs avec mon visage en guise de chiffon »,
« Écraser entre mes doigts comme une pincée de sel »,
« Ligoter un temps mort »,
« Piéger ta douce inquiétude, lui tordre le cou, lui clouer le bec ».

Cédez aux douces injonctions de Chloé, laissez-vous séduire par ses mots charmeurs, poétiques et ludiques  et vous entrerez dans un bel univers qui mêle sérieux et légèreté. La jeune artiste n'est pas à un paradoxe près : parler de l'intime en utilisant la technique de la grisaille, il fallait le faire. Cela s'appelle l'élégance.



samedi 16 juin 2018

BENEDICTE KLENE : L'ESPACE-TEMPS DES « PETITS RIENS » (Yannick Lefeuvre)




Enfant, on m'emmena un jour au kinopanorama ... extase ... immensité ... ce souvenir m'est revenu en voyant les œuvres de Bénédicte Klène. Saut qu'avec elle, si cela semble être la même aventure, il en va tout autrement. Le point de vue tranquille à la fois du temps qui passe et d'un paysage qui défile s'impose et sensibilise notre regard. Nous voilà au centre du monde, un monde à portée de main mais rendu palpable, vivant et tactile par la magie du trait de l'artiste. Nous voilà, impressionné et ravi de partager cette façon artistique de déplier, cadrer et représenter le monde. Pas de pathos, de psychologie ni de violence mais un être là presque invisible dans l'effacement du bruit, dans la certitude d'un lieu qui semble tout à coup hors du temps mais qui s'affirme présent dans la plénitude de la vie. Je tiens à saluer la performance et le talent d'une sensibilité hors pair. Elle a su saisir de façon subtile l'essence d'un paysage, les bonheurs d'une vie réelle avec ses évènements magiques qui fondent le quotidien.
Un petit air frais qui fait un bien fou.



vendredi 15 juin 2018

JEAN-PIERRE BOUTTIER "AKIL" : FROTTEMENTS DE LUMIERES (Yannick Lefeuvre)


Un jaillissement irraisonné pour des pulsations enfouies, une perte d'emprise et un vif espoir d'équilibre ... Jean-Pierre Bouttier tient la barre. Il aime le chahut qui vivifie, les ouragans qui emportent et parfois la foudre qui allume des feux à même les océans. Rien de tranquille mais l'homme taillant dans le vif du sujet pour en extraire les mouvements, des rythmiques sourdes et des sens enfouis qui refont tout à coup surface, se redresse et nous salue. Il se confronte et nous confronte à la force des frictions colorées, à une matérialité étonnantes des profondeurs, à des perspectives aux outrages flamboyants qui nous révèlent des mondes en constantes transformations. On en ressort à la fois ébloui, revigoré et c'est à notre tour de saluer l'artiste.