Une
étrange douceur du visage, contredite immédiatement par la fixité d'un regard
qui s'adresse à nous, déploie une tension proche du ravissement. Des coulures
nacrées et volubiles qui vont de l'abstrait indéchiffrable à l'évidence des
figures de madone, vibrent dans un flou diaphane cerné parfois d'un trait blanc
net et bref. Avec la constante présence animale qui se tient auprès de
l'enfant-fille-femme telle une enfance à portée de main. La violence chatoyante
des couleurs vives et la présence familière de ces mains spectrales, ces
géantes inattendues, prêtresses d'un savoir tabou, accueillent avec tendresse
le reflet de nos yeux. Ainsi notre vision renaît et se déploie sans
complaisance en des lieux de soi où l'amour réciproque a disparu.
Avec un
refus obsessionnel toujours réitéré, elle tourne le dos à la mièvrerie tout en
s'adonnant corps et âme à l'inaltérable beauté féminine. Ce refus du mièvre
s'éploie encore et encore dans une animalité à la présence parfois menaçante.
Les belles... sirènes... chaperons... déesses issues de la respiration des
virgules et sous emprise laissent libre cours à la bestialité qui rougit
l'enfant. Elle sacrifie l'être tranquille et endormi à une dévoration tragique.
Dès
l'origine de ses toiles, une déchirure marquée par l'ombre pour des visages
tranchés, fruits mûrs ouverts, sensuels à croquer mais séparés résolument par
la coupure du sombre et de la lumière. Dans les senteurs inestimables de la
petite enfance, dans les courbures parfaites des résurgences de glaces bleuies,
d'oranges moisies, de verdâtres humidités, la perfection trahie devient
sublime. Elle chuchote à notre oreille qu'il n'est de beauté que rendue à
l'humaine réalité. Par le truchement des subtiles et vives teintes coupantes,
durcies aux feux intérieurs, elle ouvre les esprits à l'essence de l'art où
violences, douceurs et espoirs s'inclinent devant le réel en phase avec un
geste pictural juste.
SylC trône
sur notre fond d'écran en écho au tableau accroché dans notre salon. Elle est
donc vue et sue au quotidien mais l'énigme perdure intacte. Je tente une
résolution car elle me semble malgré l'inexplicable de ses toiles, un désir
toujours à la tâche d'un possible devenir.
A la fleur
de l'émotion aux rougeurs violentes pour vouloir, aux nuances glacées coupées
au tranchant des couteaux pour distinguer, à la noirceur bestiale des présences
animales prédatrices pour révéler, elle oppose chaleur et froidure dessinant
une évidente frontière. C'est ça le secret, la frontière toujours, lieu de
tensions, de cris d'amour et d'élévation. Elle se tient et nous tient sur la
bordure, sur le tranchant de la bascule, au seuil de la falaise. Elle peint par
nécessité pour nous dire la vie, la véritable selon elle. Pas facile, pas
donnée mais puisée, creusée jour après jour dans les éclats neufs de la
patience du désir.
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